En 2021, deux étudiant·es racisé·es de nationalité étrangère, Junior Masudi Wasso et Ouiam Ziti ont tou·tes deux été arreté·es et emprisonné·es dans un centre fermé, alors même qu’iels avaient leurs papiers et droits de séjour en Belgique. Le mardi 18 avril 2023, le tribunal civil de Bruxelles rendait deux jugements condamnant l’Etat belge pour avoir retenu illégalement les étudiant·es.
Iels ont tou.tes deux été arrêté·es par la police aéroportuaire, Junior à Zaventem et Ouiam à l’aéroport de Charleroi, à la suite d’un contrôle. Ouiam, étudiante de médecine dentaire avec un visa français, a été arrêtée le 13 décembre sous prétexte qu’elle n’avait pas de cash « pour démontrer qu’elle est bien capable d’assurer sa subsistance en Belgique »1. Elle avait pourtant plusieurs cartes bancaires sur elle et la possibilité de retirer de l’argent. Alors qu’elle passait en Belgique pour rendre visite à son oncle avant de se rendre en France, elle sera enfermée pendant 11 jours dans un centre fermé.
Dans son rapport transmis à l’Office des Etrangers, pour justifier son arrestation et son enfermement, la police a menti en rapportant que Ouiam « déclare se rendre à Bruxelles pour une durée de 22 jours et n’a aucune intention de se rendre en France » et également qu’elle « ne dispose ni d’une carte de crédit, ni d’une carte de banque »2.
Junior, étudiant à l’UCL, a été arrêté arbitrairement le 18 septembre sous prétexte qu’il aurait eu du mal à répondre à des questions sur le tableau de Mendeleïev et la théorie darwinienne pendant son interrogatoire, sa crédibilité d’étudiant était donc mise « en cause » selon la police3. Il sera ensuite enfermé durant 16 jours en centre fermé. Deux tentatives d’expulsions illégales ont été organisées par l’Etat, toutes deux déjouées par des soutiens venu manifester. Après des rebondissements et notamment un mensonge du secrétaire d’Etat à l’asile et migration de l’époque Sammy Mahdi (CD&V)4, Junior s’est vu délivrer un nouveau titre de séjour.
Dans ces deux affaires extrêmement similaires, les deux étudiant·es ont été arreté·es et enfermé·es arbitrairement car iels sont racisé·es et étranger·ères. Dans son jugement, le tribunal civil de Bruxelles ne semble pourtant pas soulever le caractère imminemment raciste de ces discriminations, selon ce qui a été relayé dans la presse.
En effet, le tribunal commente « [Junior] ne pouvait pas être refoulé par les autorités chargées du contrôle aux frontières ». Il énonce aussi que les justifications de l’enfermement de Ouiam Ziti « ne sont pas des motifs légalement admissibles qui pourraient justifier la détention », et que les autres motifs avancés pour légitimer une intervention policière sont « d’ordre général et stéréotypés, ne permettant pas de constater que l’autorité administrative a procédé à un examen concret et individualisé ».5
Junior et Ouiam ont gagné leur procès et leurs discrimination ont été médiatisées, mais combien ne le sont pas ? Combien y-a-t-il de condamnations de justice effectives, alors que la Belgique semble expulser et enfermer illégalement des gens au quotidien, alors que sa politique migratoire raciste tue en centre fermé6?Par ailleurs, même lorsque le gouvernement est condamné par la justice pour sa politique migratoire (et il l’a été de nombreuses fois7), il s’agit en général d’amendes, qui n’empêchent malheureusement en rien que cette politique se poursuive. Tout au mieux, les meubles du cabinet à l’asile et migration sont saisis8.
Il semble dès lors important de soutenir les collectifs qui luttent directement en soutien aux personnes enfermées dans les centres fermées, comme Getting The Voice Out, et de soutenir également ceux qui luttent contre la politique migratoire belge, pour les personnes sans-papiers ou des demandeur·ses d’asile, comme Mur-mures, La Voix Des Sans Papiers, le Réseau Ades, et Le Comité des Femmes Sans-Papiers.
Sources :
bruxellesdevie.com 