Il y a quelques mois, suite à l’ouverture de l’Hospitalière à Saint-Gilles, débutait la Campagne de réquisition solidaire. 6 lieux ouverts plus tard et des centaines de personnes logées, celle-ci se terminait le 28 mars en grande pompe avec la réquisition d’un bâtiment à l’intersection entre la rue Defacqz, l’avenue Louise et la rue de Livourne.
Ce bâtiment acheté en 2018 pour quelques 18 millions d’euros et inoccupé depuis appartient à une des plus grandes fortunes belges, la richissime famille héritière de Spoelberch ayant une fortune estimée à plus de 12 milliards d’euros. La même famille actionnaire d’ABinbev qui a été citée dans les différents scandales de fraude fiscale, comme ceux des PanamaPapers, LuxLeacks ou encore Swissleacks1.
Depuis plus de deux mois, le bâtiment Louise est occupé par 3 collectifs, 2 collectifs de La Voix Des Sans Papiers et le collectif La Poussière composé de personnes mal-logées avec et sans papiers. Alors que les négociations allaient de bon train entre les habitant.e.s et la propriétaire Caroline de Spoelberch, fin avril les 100 personnes qui occupent le bâtiment étaient à nouveau menacées d’expulsion.
Pourtant, durant les négociations une proposition de convention d’occupation avait été faite aux habitant.e.s, leur promettant sous certaines conditions de pouvoir occuper les lieux. Malgré cela, une ordonnance d’expulsion unilatérale (procédure de justice uniquement possible si le/la propriétaire ne connait pas l’identité des personnes qui occupent) avait été adressée aux occupant.e.s à la fin du mois d’avril, alors même que ces dernier.e.s avaient transmis leur identité dès le 29 mars. Il s’agit donc une procédure juridique abusive2.
À ce jour, aucuns travaux ne sont prévus et aucune demande de permis de construire n’a été déposée par les propriétaires3. Un rapport de la ville de Bruxelles indique également que le bâtiment est inoccupé depuis 2017 et qu’une « occupation en toute sécurité [y] est possible »4. Dans une interview pour @Toutvabien, la porte-parole du bâtiment Louise parle de mascarade : “un bâtiment qui est inoccupé et dont les propriétaires ont subitement besoin au moment où des gens l’occupent. »
Face à la menace d’expulsion une campagne de mobilisation a été mise en place par les habitant.e.s, notamment via le site http://stopexpulsionlouise.be/#agir. Une pétition adressée aux propriétaires exigeant le retrait immédiat de la procédure d’expulsion ainsi qu’un accord permettant aux familles sur place d’habiter jusqu’aux travaux du bâtiment, a récolté plus de 2000 signatures de citoyen.nes ainsi que celles de 60 organisations différentes. Une action surprise devant le domicile de Caroline de Spoelberch rassemblant plusieurs dizaines de personnes a également été organisée. Ces différents modes d’actions ont permis d’établir un rapport de force entre les occupant.e.s et les propriétaires. C’est face à ce rapport de force que les propriétaires ont retiré la procédure d’expulsion, nous annonçait la Campagne De Réquisition Solidaire ce 26 mai.
Nous rappelons qu’il y a plus de 4000 personnes sans-abri et mal-logées avec ou sans papiers à la rue à Bruxelles6 quand la région bruxelloise compte elle-même plus de 6,5 millions de mètres carrés vides7 ainsi que des milliers de meublés touristiques type AirBnB. Les bourgmestres des différentes communes bruxelloises disposent pourtant d’un droit de réquisition des bâtiments vides depuis au moins 6 mois, afin d’y reloger des personnes sans abri ou mal-logées.8 Au moment où nous postons cet article, à peu près 700 femmes et hommes sans-papiers sont en grève de la faim depuis le 23 mai pour exiger la régularisation de toutes les personnes sans-papiers sur le territoire belge.9 Nous reviendrons plus amplement sur le mouvement sans-papiers et les grèves de la faim prochainement.
1, 3 et 5 : https://toutvabien.tv/des-sans-abris-contre-la-2e-fortune-de-belgique/
2 : http://stopexpulsionlouise.be/lhistoire-du-143-avenue-louise/
4 : http://stopexpulsionlouise.be/lhistoire-du-143-avenue-louise/
8 : • Nouvelle loi communale – art. 134bis Arrêté royal du 6 décembre 1993 réglant le droit de réquisition d’immeubles abandonnés, visés à l’article 134bis de la Nouvelle loi communale Code judiciaire – art. 591, 8°