La friche Josaphat est un endroit paisible à Bruxelles. Un des derniers. Il s’agit d’une zone de 25 hectares longeant la ligne de chemin de fer, à cheval sur les communes de Schaerbeek et Evere. Comme tant d’autres zones encore plus ou moins naturelles, la friche Josaphat est sujette à la pression urbanistique. Elle en effet menacée de bétonisation par un des 13 PAD (Plan d’Aménagement Directeur) de la région bruxelloise. Un PAD, selon perspective.brussels (l’administration compétente), c’est un ’outil d’aménagement de compétence régionale qui permet de définir en un seul mouvement les aspects stratégiques et réglementaires d’une stratégie urbaine ». En langage signifiant, cela veut dire que c’est un plan d’aménagement d’un territoire situé dans une zone où il y a du territoire à (ré)investir. Autrement dit, dans le cas qui nous concerne, il s’agit d’un plan de destruction massif de la friche et de sa biodiversité.
Des bruxellois·e·s se sont mobilisé·e·s pour s’opposer à ce projet. Ils et elles se sont rassemblé·e·s dans un groupe facebook, nommé “Sauvons la friche Josaphat”. Une enquête publique était en cours avant l’épisode de la crise sanitaire. Le sujet était censé être en discussion. D’ailleurs, la commune de Schaerbeek avait remis un avis défavorable au projet de perspective.brussels. Bref, rien n’explique le début des travaux. Ils ont pourtant commencé ce 25 avril. En plein confinement. Sans permis d’urbanisme. Contactés, la SAU (entreprise responsable du projet) a expliqué que ce ne sont pas des travaux qui nécessitent un permis puisqu’il s’agit pour permettre à des engins d’accéder à la zone et de faire des tests en matière de stabilité et de pollutions. “Ces travaux n’ont rien à voir avec le PAD”, disent-ils. “On n’est pas des bétonneurs”. La bonne blague. Il faudra nous expliquer comment une entreprise d’aménagement du territoire, qui prévoit de construire des bâtiments sur une friche, n’est “pas des bétonneurs”.
En plus, cette technique de faire comme si de rien n’était mais d’avancer les travaux en douce, on la connaît. C’est celle qu’ils ont utilisés à Haren, par exemple, sur le chantier de la maxi-prison. Et puis, la technique de mobiliser la pollution du site comme argument contre les opposant·e·s, on la connaît aussi. C’est celle qui est utiliser en ce moment-même à la Zablière – Zad d’Arlon, pour discréditer le combat des zadistes alors même que le bourgmestre arlonais racontait il y a peu, que la zone était peu polluée et qu’il n’y avait pas de danger.
Tout cela pour dire : les projets d’urbanisation sont légions. Les gens qui s’y opposent encore plus. Il s’agit donc de trouver la bonne stratégie d’opposition. Les recours en justice et les enquêtes publiques, bien qu’elles s’avèrent parfois payantes, prennent du temps. Pendant ce temps-là, dans ce cas-ci, la SAU implante, doucement mais sûrement, les prémisses de la bétonisation. Une fois ces prémisses implantés, la lutte contre le projet sera plus compliquée. Alors, que fait-on ? On compte sur l’enquête publique? On compte sur la “démocratie” ? Ou pas. ZAD partout, diraient certain·e·s de nos ami·e·s qui fréquentent les bois d’Arlon. Notez que les stratégies sont combinables et se peuvent se renforcer mutuellement.