
Après d’innombrables recours contre ce projet et une lutte qui dure depuis 2020, le permis de destruction du Palais du Midi dans le cadre du chantier du métro 3 a finalement été octroyé jeudi 22 août dernier.

Cette ultime étape dans le processus d’octroi des permis de démolition du Palais du Midi intervient après que les autorités bruxelloises ont presque tout tenté pour parvenir à sa destruction, quitte à contourner de nombreuses normes urbanistiques, et ce malgré la forte opposition des riverain·es, des commerçant·es du quartier ainsi que de nombreuses associations défendant le droit à la ville.
Le 25 septembre 2023, une ordonnance spécifique avait déjà été inscrite à la commission du développement territorial du parlement bruxellois pour raccourcir le délai de demande du permis d’urbanisme dans le cadre de cette destruction. Cette ordonnance avait ainsi permis de réduire la procédure de plusieurs années.
Le Palais du Midi, construit en 1872, sera donc finalement détruit au profit de la construction des infrastructures couvrant le trajet du nouveau métro 3. Aujourd’hui, le Palais du Midi accueille de nombreuses salles de sport, des commerces en tous genres et la Haute École Francisco Ferrer.
La destruction de ce palais va ainsi entraver les sociabilités des habitant·es du quartier, mais aussi des activités sportives et culturelles qui permettaient de répondre quotidiennement aux besoins de la vie du quartier Stalingrad.
Ce projet de démolition partielle du Palais du Midi intervient alors que les travaux de construction du métro 3 font ravage au sein de la rue de Stalingrad et du quartier Lemonnier. Depuis le début des travaux, la technique de construction utilisée est celle du « cut and cover », elle consiste à creuser le futur tunnel et la future station depuis la surface. Cette technique perturbe fortement la vie de ce quartier commerçant. Depuis le début du chantier, de nombreux magasins ont fait faillite ou ont été délogés.
Initialement estimé à 1,8 milliard d’euros pour une mise en service prévue en 2024, le coût du projet atteint désormais 4,7 milliards d’euros, tandis que son achèvement est repoussé à 2034, voire 2038.
De plus, plusieurs estimations tendent à prouver que le métro 3 ne permettra pas de diminuer drastiquement le nombre d’automobilistes à Bruxelles. En effet, si les chiffres se confirment à la fin du chantier, la construction du métro fera diminuer le trafic automobile de moins de 1 % à Bruxelles, tandis que la nouvelle station Toots Tielemans (dont le chantier éventre le quartier Stalingrad depuis le début de sa construction) ne devrait que faire augmenter le nombre quotidien d’usager·ères des transports de 40 personnes.
La Ville assure de son côté que la construction de la ligne de métro 3 permettra de répondre à des problématiques environnementales comme la qualité de l’air. Cependant, des études estiment que les infrastructures n’apporteront des bénéfices environnementaux qu’à partir de 2090, tant les matériaux et les moyens utilisés sont polluants.

Ainsi, plusieurs études ont montré que les objectifs poursuivis par la construction de cette nouvelle ligne de métro ne relèvent ni de considérations environnementales, ni de la volonté d’augmenter significativement le nombre d’usager·es des transports en commun bruxellois. En réalité, la construction du métro 3 tend bien à renforcer la triple jonction entre Bruxelles-Midi, le nouveau quartier Stalingrad et le piétonnier, dans un objectif de touristification programmée des quartiers populaires du centre de Bruxelles — ceci, sans prise en compte des réalités et de l’histoire des quartiers qui l’entourent.
L’avancée fulgurante dans le dossier de destruction du Palais du Midi enfreint les règles d’urbanisme normalement en vigueur et prouve à quel point le débat entre public et politique n’est pas respecté par nos autorités.
La destruction d’une partie du quartier de Stalingrad et du Palais du Midi fait ainsi les frais de ces politiques dites de « rénovation urbaine ». Cette intention avait été pleinement assumée par l’ancien ministre bruxellois à la mobilité, Pascal Smet (PS), qui avait déclaré qu’il y aurait « beaucoup d’Arabes » dans le quartier Stalingrad ou encore que la construction de « beaux immeubles et de belles avenues » serait bénéfique pour la vie du quartier. Celui-ci déclarait aussi lors d’une interview au sujet nuisances causées par le chantier du métro 3 dans le quartier Stalingrad « qu’il faut parfois oser rendre les gens heureux contre leur volonté ».
Depuis qu’il a débuté, le chantier du métro 3 apparaît comme un déni de démocratie et de procédure normalement en vigueur. Il s’inscrit dans une visée politique décomplexée de gentrification programmée des quartiers populaires, dont les lieux de sociabilité historiques comme le Palais du Midi font aujourd’hui les frais.

Sources :
https://www.ieb.be/Moins-de-trams-a-Liege-arret-du-projet-de-metro-3-la-coherence-ca-change-tout https://www.ieb.be/Metro-3-le-PPP-une-tres-mauvaise-idee
VAN GYZEGEM, Thyl. Métro Nord : causes et conséquences d’un projet controversé. Inter-Environnement Bruxelles
https://www.premetroplus.be/fr
https://www.ieb.be/Metro-3-fiasco-sur-toute-la-ligne
