
Plus d’une personne sur trois actuellement au chômage va perdre ses allocations, à cause de la réforme du chômage de l’Arizona. Au total, c’est plus de 231 000 personnes qui vont recevoir un courrier de l’ONEM, l’Office national de l’emploi, leur indiquant qu’elles vont être exclues du chômage, selon L’Echo.
Pour la FGTB, ces mesures sont « une déclaration de guerre » aux travailleur·ses de Belgique.

Il y a quelques mois, on parlait de 180 à 190 000 personnes, aujourd’hui 231 000. Cependant, certaines des personnes qui vont recevoir ce courrier ont entre temps repris le travail, il est donc dur d’estimer combien de personnes exactement vont être exclu·es.
Normalement « à partir du 1er janvier 2026« , la durée des allocations de chômage sera limitée à deux ans pour celles et ceux qui auront travaillé quatre ans. Certain·es seront exclu·es encore plus tôt : après seulement un an de chômage s’ils et elles n’ont travaillé qu’un an. Le nouveau système repose sur un calcul strict : chaque période de quatre mois prestée donne droit à un mois de chômage. Ainsi, une personne ayant travaillé trois années consécutives sera exclue après un an et neuf mois de chômage. Pour atteindre les deux années complètes d’allocations, il faudra justifier de cinq années de travail sans interruption. Les demandeur·euses d’emploi de plus de 55 ans ne seront exempté·es de cette limitation que s’ils et elles peuvent prouver une carrière professionnelle de 30 ans au total en 2025 et en 2030, 35 ans de carrière cumulés.
Ces réformes présentées comme « nécessaires« , selon le mot d’ordre déjà démenti de Tatcher « There is no alternative« , cachent en réalité une volonté de détricoter notre système social, précariser et pointer du doigt toujours plus les pauvres. Cette réforme nourrit l’imaginaire du chômeur / profiteur et le mythe de « l’assisté ». Or, les seules personnes qui profitent réellement au sein de l’économie sont les super riches. Les grands propriétaires et patrons, qui bénéficient de l’exploitation de leurs salariés, qui proportionnellement paient bien moins d’impôts que les travailleur·ses normaux et nagent entre les cadeaux de l’état pour faire fleurir leur business. Ce sont eux, les vrais assistés de la société. Pendant que les gens normaux, les travailleur·ses doivent descendre dans la rue, se mettre en grève, affronter les patrons et l’état, lorsqu’ils et elles réclament le minimum pour vivre dignement.
Ces logiques d’exclusion de la solidarité portée par la réforme, qui vont avoir des conséquences très concrètes sur la vie des personnes concernées, sur la vie de leur famille, ne vont ni « pousser au travail » les personnes au chômage, ni réellement « faire gagner de l’argent » à l’Etat.
Selon des études produites par la FGTB, les seules conséquences la limitation des allocations est qu’elle « éloigne durablement de l’emploi via l’aggravation des conditions compliquant la recherche d’emploi (ressources, logement, précarité, dépendance familiale…) et des phénomènes d’auto-exclusion, de repli sur soi ; [qu’elle] a très majoritairement un effet négatif sur l’insertion dans l’emploi ; [qu’elle va] toucher plus particulièrement les personnes les plus fragiles, les moins susceptibles de retrouver un emploi, a fortiori un emploi stable et durable leur permettant de retrouver des droits sociaux complets. » FGTB Wallone. Une étude de l’ONEM montre que la dégressivité des allocations et leur limitation dans le temps n’ont aucun impact sur l’emploi, plongeant ainsi les gens dans la pauvreté et compliquant leur recherche d’un travail.
Le but derrière cette réforme ? Imposer un système méritocratique, sans solidarité, où les inégalités structurelles se renforcent, pendant que la porte de « l’ascenseur social » a été définitivement condamnée – si un jour elle avait été ouverte.
Cette nouvelle réforme et offensive anti-sociale, culmine 20 ans de destruction de « l’assurance chômage » en Belgique : « […] Le véritable objectif, jamais avoué, des défenseurs des politiques d’exclusion : appauvrir et diminuer le niveau de protection sociale pour faire pression à la baisse sur les salaires et conditions de travail. Appauvries, contrôlées de toutes parts, exclues et stigmatisées, les personnes sans emploi seraient prêtes à accepter le premier job précaire venu. Si elles n’y sont pas contraintes par un quelconque système de travail obligatoire, comme certains en rêvent. » FGTB Wallone
Au sujet des prétendues nécessités budgétaires, l’étude de la FGTB est également très claire : « Quant aux économies budgétaires – avancées par certains – elles seraient dérisoires […]. Qui plus est, elles seraient quasi annihilées par le transfert de charge qui se ferait vers les CPAS.«

Ce transfert vers les CPAS va faire peser ce poids financier énorme sur les régions au-lieu du fédéral. Cela va donc aussi dans le sens du projet indépendantiste flamand, qui souhaite le plus possible retirer au fédéral ses compétences pour les diriger vers les régions et arriver à une situation de confédéralisme.
En somme, un système qui abandonne plus de 200 000 personnes à la précarité n’est pas une fatalité, mais bien un choix politique. Elle institutionnalise l’exclusion, fragilise encore davantage les plus précaires et accentue les inégalités structurelles. Derrière le discours de responsabilité individuelle et d’efficacité économique se cache une stratégie claire : casser la solidarité, diviser les travailleur·ses et normaliser la pauvreté. Face à cette offensive, il est essentiel de rappeler que la sécurité sociale est un droit collectif arraché par des luttes, et que sa défense exige aujourd’hui une mobilisation large et déterminée.
Sources :
« 231.000 chômeurs menacés d’exclusion », L’Echo, https://www.lecho.be/dossiers/gouvernement-federal/231-000-chomeurs-menaces-d-exclusion/10621951.html
« Chômage : inefficacité longue durée », FGTB, https://fgtb-wallonne.be/positions-politiques/chomage-inefficacite-longue-duree-position/
« 20 ANS DE DÉMOLITION : POURQUOI ET COMMENT ILS VEULENT DÉTRUIRE L’ASSURANCE CHÔMAGE (2/4) », FGTB, https://fgtb-wallonne.be/radio/20-ans-de-demolition-pourquoi-et-comment-ils-veulent-detruire-lassurance-chomage-2-4/
« Réforme du chômage : 100.000 chômeurs risquent l’exclusion », RTBF, 20 /03/2025. Dispo en ligne ici https://www.rtbf.be/article/reforme-du-chomage-100-000-chomeurs-risquent-l-exclusion-11520475
« Un chômeur sur trois bientôt exclu ? Cinq conséquences prévisibles de la réforme du chômage », RTBF, 05/04/2025. Disponible en ligne ici : https://www.rtbf.be/article/1-chomeur-sur-3-bientot-exclu-5-consequences-previsibles-de-la-reforme-du-chomage-11528556
« Réforme des allocations de chômage : que vont devenir les personnes exclues ? », RTBF, 16/02/2025. Disponible en ligne ici : https://www.rtbf.be/article/reforme-des-allocations-de-chomage-que-vont-devenir-les-personnes-exclues-11504465
