
Le Palais du Midi, construit en 1872 devrait être en partie détruit au profit de la construction des infrastructures couvrant le trajet du nouveau métro 3. En raison de problèmes techniques de stabilité, liés notamment au fait que les sous-sols bruxellois sont marécageux, la portion de tunnel dédié à la jonction entre le pré métro déjà existant et la future station Toots Tielemans ne pourra se faire sans destruction partielle du Palais du Midi. Aujourd’hui, le Palais du Midi accueille de nombreuses salles de sport, des commerces en tout genre et la haute école Francisco Ferrer.
Le lundi 25 septembre dernier, une ordonnance spécifique a été inscrite à la commission du développement territorial du parlement bruxellois. Elle sera votée en plénière le vendredi 29 septembre afin de créer une procédure qui raccourcirait considérablement le temps de demande de permis pour détruire l’intérieur du Palais du Midi. Cette procédure express s’est constituée malgré l’arrêt du dossier de démolition depuis juin 2021 et la ferme opposition des riverain·es du quartier. Pour information, une procédure habituelle de demande de permis d’urbanisme prend entre deux et cinq ans.
En mettant en place une mesure qui permet de s’affranchir des lois et des attentes relatives aux permis d’urbanisme, le gouvernement bruxellois nie les enjeux sociaux liés à ce lieu emblématique. Le Palais du Midi est un lieu d’usage quotidien pour les jeunes et les familles du quartier. En détruisant le Palais du Midi, le gouvernement bruxellois entraverait des sociabilités fortes entre les habitant·es mais aussi des activités sociales, sportives et culturelles qui permettent de répondre quotidiennement aux besoins de la vie du quartier Stalingrad.

Ce projet de démolition partielle du Palais du Midi intervient alors que les travaux de construction du métro 3 font ravage au sein de la rue de Stalingrad et du quartier Lemonnier. Depuis le début des travaux dans le quartier Stalingrad, la technique de construction utilisée est la technique de « cut and cover » qui consiste à creuser le futur tunnel et la future station depuis la surface. Cette technique perturbe fortement la vie de ce quartier commerçant. Depuis le début des travaux, de nombreux magasins ont fait faillite ou ont été délogés.
La ville assure de son côté que la construction de la ligne de métro 3 permettra de répondre aux problématiques environnementales liées à l’écologie urbaine. Cependant, des études estiment que les infrastructures n’apporteront des bénéfices environnementaux qu’à partir de 2090 tant les matériaux et moyens utilisés sont polluants. De plus, si la ville avait voulu améliorer les infrastructures de transport en commun à Bruxelles, elle aurait pu opter pour la construction de tram en voirie. La construction d’une ligne de métro coûte 7 à 12 fois plus cher que la construction d’une ligne de tram1.
Cette envie affichée de rendre la ville plus « verte » par la construction du métro 3 cache toute une série d’intérêts politiques et économiques. La construction de cette ligne constitue une opportunité de continuer à « embellir » une partie des quartiers populaires qu’elle traverse. En effet, l’ex-Secretaire d’Etat bruxellois à l’urbanisme, Pascal Smet (PS), laissait penser qu’il y aurait « trop d’arabes » dans le quartier Stalingrad ou encore que la construction de « beaux immeubles et de belles avenues » seraient bénéfiques pour la vie du quartier2. Smet donne ici une définition simple des processus de gentrification planifiés par la construction du métro 3.
De plus, plusieurs estimations tendent à prouver que le métro 3 ne permettra pas de diminuer drastiquement le nombre d’automobilistes à Bruxelles. En effet, si les chiffres se confirment à la fin du chantier, la construction du métro fera diminuer le trafic automobile de moins de 1% à Bruxelles tandis que la nouvelle station Toots Tielemans (dont le chantier éventre le quartier Stalingrad depuis le début de sa construction) ne devrait faire augmenter le nombre quotidien d’usager·ères des transports de seulement 40 personnes1.
Finalement, la construction du métro 3 tend à renforcer cette triple jonction entre Bruxelles midi, le nouveau quartier Stalingrad et le piétonnier dans un objectif de touristification programmée des quartiers populaires du centre de Bruxelles. Ceci, sans prise en compte des réalités et de l’histoire des quartiers qui l’entourent. L’avancée fulgurante dans le dossier de destruction du Palais du Midi enfreint les règles d’urbanisme normalement en vigueur et prouve à quel point le débat entre public et politique est clos.
La durée de construction ainsi que le budget alloué par le gouvernement bruxellois ont sans cesse augmenté depuis le début du chantier. Désormais, les travaux devraient d’être finalisés au minimum pour 2030 (au lieu de 2025 initialement) et le budget utilisé dépasse déjà les 2,3 milliards d’euros alors que la seconde partie du chantier n’a toujours pas débuté. Les intérêts politiques et économiques poursuivent la destruction du quartier Stalingrad. Sous couvert de bénéfices qui paraissent encore flous, le réaménagement du quartier Stalingrad relève davantage d’un processus de gentrification expéditive aux relents de mépris de quartier.
Sources:
vidéos :
-Bruxelles en mouvements #4 – Métro 3 – YouTube (1)
-ATELIERS URBAINS #19 STALINGRAD, AVEC OU SANS NOUS ? – YouTube (2)
articles :
-Retard et coûts supplémentaires pour le métro 3 à Bruxelles – La DH/Les Sports+ (dhnet.be)
-Une nouvelle étape franchie pour le démontage du Palais du Midi – BX1
dossier :
-ieb_etude_metro_dec2019.pdf

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