MORT DE SANDA DIA LA RACE ET LA CLASSE COMME FACTEUR DE L’INJUSTICE

   

Trigger Warning : torture, racisme, classisme

Il y a cinq ans, en décembre 2018 Sanda Dia est décédé après avoir subi une réelle torture lors de son baptême universitaire à Louvain.

Le verdict est enfin tombé et les 18 membres du cercle «Reuzegom» de la KU Leuven présents au moment des faits ont chacun été condamnés à une amende de 400 euros ainsi qu’à 300 heures d’intérêts généraux.

La famille de Sanda avait exprimé la volonté que les jeunes qui ont tué Sanda n’aillent pas en prison à la condition que durant le procès ils répondent à toutes leurs questions. Les 18 ont gardé le silence.

Sanda était un jeune homme issu d’une famille Sénégalaise ouvrière. Lorsqu’il a été tué, il avait 20 ans et etait en pleine forme. Alors à la KUL, voulait entrer dans le cercle «Reuzegom», connu pour son réseautage dans les hautes sphères néerlandophones.

Durant son baptème initiatique, Sanda s’est fait torturer jusqu’à ce qu’il en meure. Il est mort ce soir là car il était noir, les deux autres personnes blanches qui se faisaient baptiser avec lui ne sont pas mortes.

Ce qu’on a fait passer pour une «blague qui a mal tourné» ou un baptême qui aurait «dérapé» a en réalité été provoqué par le racisme enraciné dans le cercle Reuzegom. Durant le premier jour de son batème, il a été forcé à boire une grande quantité d’alcool sans avoir accès à l’eau. Le lendemain, à ingurgiter de l’huile de poisson jusqu’à ce qu’il en vomisse, à avaler des poissons rouges vivants ainsi qu’à rester une partie de la nuit dehors dans un trou rempli d’eau glacée pendant qu’on lui urinait dessus. A la suite de l’ingurgitation de l’huile de poisson et d’une grave hypotermie, il est décédé d’un oedème cérébrale.

Les charges retenues contre les 18 condamnés sont celles ; d’homicide involontaire, , traitement dégradant, infraction sur la législation sur le bien-être animal. La non assistance en personne en danger et administration de substance nocive ayant entrainée la mort, n’ont pas été retenues.

On observe par ailleurs que le cercle «Reuzegom» est très fermé, réunissant essentiellement les fils de la bourgeoisie blanche néerlandophone et qu’il est connu pour son racisme. Avant suppression, des membres du cercle s’affichaient sur Facebook en tenue du Klux Klux Klan, un membre parlait d’Hitler comme de son «bon ami allemand». Les membres du cercle avait également pour pratique de chanter des chansons à la gloire de la colonisation du Congo. Certains témoignages révèlent qu’ils appelaient Sanda avec ie n-word pour qu’il réalise des corvées tout au long du baptême.

Ceux qui ont provoqué la mort de Sanda Pont fait en toute impunité.

Ce sont des fils de magistrats, d’industriels, de notaires, de gouverneurs, de gens hauts placés au réseau important, … qui ont eu les meilleures avocates pour se defendre. Ils ont fait trainer l’affaire, dissimulé toutes les preuves, supprimé ce qu’ils avaient de compromettant sur les réseaux sociaux. Collectivement, ils ont choisi de ne répondre à aucune des questions de la famille de Sanda durant le procès. C’était pourtant la seule contrainte que celle ci avait opposé en échange de sa clémence, avoir des réponses à la questions qui les ronge depuis plus de 5 ans: pourquoi Sanda est-il mort ce soir là ?

Si, au vu de l’omerta qui règne chez les 18 condamnés, il est difficile d’affirmer qu’ils avaient effectivement la volonté de tuer Sanda, il paraît évident que, durant tout son baptême, Sanda a subi un traitement raciste différencié des autres « bleus » parce qu’il était noir et que C’est ce traitement raciste qui a mené à sa mort, volontairement ou non.

Quelles étaient les chances d’une famille immigrée et ouvrière face à l’élite flamande et à sa justice?

Durant toute la durée du procès, la dimension raciale a été écartée par la défense des meurtriers de Sanda, qui rejette tout sur un baptême «irréfléchi» qui aurait été trop loin. Elle ne semble pas non plus être reprise dans la décision de justice condamnant les 18. Comment est-il possible que ce qui a été relayé dans la presse vis-à-vis de la décision de justice ne mentionne pas la motivation raciale au regard des éléments vus plus haut ?

Que faut-il de plus à la justice que des jeunes qui s’habillent en tenu de suprémaciste blanc du KKK, qui parlent d’Hitler comme de leur bon ami allemand, et appellent Sanda par le n-word ? Que se serait-il passé si la situation avait été inversée? Une nouvelle fois, le système judiciaire belge montre qu’il ne rend pas justice aux victimes, en particulier lorsqu’elles sont racisées et pauvres. Pire il défend leurs oppresseurs.

Sources :

-Belgique : pris pour cible parce que Noir ? Le bizutage mortel de Sanda Dia – Focus (france24.com) (1)
-Décès de Sanda Dia lors d’un bizutage dans un cercle étudiant : les participants condamnés à une peine de travail par la cour d’appel d’Anvers – rtbf.be
-Sanda Dia, 20 ans, mort lors d’un bizutage organisé par des étudiants de bonnes familles en Flandre (lemonde.fr)
-Affaire Sanda Dia: un comitard souligne la fierté d’avoir passé son baptême – Le Soir

Avec l’affaire Reuzegom, les visages de «l’élite» flamande du côté des inculpés
https://www.lesoir.be/387851/article/2021-08-05/avec-laffaire-reuzegom-les-visages-de-lelite-flamande-du-cote-des-inculpes

A Black Belgian Student Saw a White Fraternity as His Ticket. It Was His Death.https://www.nytimes.com/2020/10/04/world/europe/belgium-racism-sanda-dia.html

La «Lettre d’Ivan De Vadder»: L’élite de la Flandre? Pas la mienne!
https://www.lesoir.be/325366/article/2020-09-16/la-lettre-divan-de-vadder-lelite-de-la-flandre-pas-la-mienne